décadence. (hermione)

C’est que ça commençait à devenir plutôt routinier, ces histoires. Tu te souvenais encore, lorsque tu avais commencé comme Oubliator pour le Ministère, on ne va pas se mentir, Drago, tu avais accepté ce boulot parce que tu t’étais imaginé que ce serait relativement tranquille. Tu sais, quelques mois à peine après cette guerre, quand tu étais encore dans cet état d’esprit relativement sombre, que tu pensais que les Moldus étaient bien bêtes pour voir quoi que ce soit … Ouais, pour le coup, c’est toi qui avais été stupide parce que dés les premiers temps, tu avais enchainé les missions. Au départ, c’était quelques coups de baguette, par ci, par-là, des petits accidents de la vie courante, des sorciers imprudents, et si ça dépassait tes prévisions en matière de charge de travail, ce n’était rien comparé à ce qui se passait depuis plusieurs semaines.

Quand ça n’était pas d’apparence complètement volontaire de la part de quelques sorciers mal intentionné, il s’agissait de dérapages liés à la situation. Ce soir, ça avait été une intervention d’Aurors qui avait mal tournée, il y avait eu au moins huit témoins moldus, tu avais dû en gérer cinq et autant dire qu’avec ta maudite baguette récalcitrante, ça n’avait pas été de tout repos. Qu’on se le dise : tu étais d’humeur massacrante, et à la fois, complètement abattu par la fatigue. La dernière dont tu t’étais occupé avait été une vieille dame qui, très honnêtement, même avoir oublier la raison pour laquelle elle se sentait littéralement paniqué, n’avait pas daigner te lâcher d’une semelle jusqu’à ce que tu en viennes inévitablement à te montrer désagréable. Là, elle t’avait attribué des dizaines de noms d’oiseaux avant de tracer sa route, sans manquer de tenter de mettre un coup de canne.

Ce qu’une fois de retour au Ministère que tu avais pu souffler. Bien qu’il t’ais fallu rendre des rapports avant de quitter les bureaux de la Brigade, tu avais assez rapidement réussi à te sortir de toute cette administration que tu avais en horreur. L’heure de ton départ largement dépassée, tu t’étais glissé dehors alors que ton nom de famille résonnait une énième fois à travers les locaux et c’est avec un soulagement non dissimulé que tu avais souffler une fois dans le couloir. Tu n’étais cependant pas tiré d’affaire … du coup, après avoir réajuster ta cape et remonter la large capuche de cette dernière sur tes mèches blondes, tu baisses la tête avant de filer le plus rapidement possible. Ce n’était pas la première fois que tu prenais la fuite de cette manière, généralement, tu réussissais ton coup mais ce soir, il y avait du monde dans les corridors du Ministère, même à une heure si tardive, et sans que tu ne puisses l’éviter, ou le voir venir à l’avance, tu ne tardes pas à entrer en collision avec une silhouette qui arrive pile face à toi …

Par Salazar, Drago, tu as de la chance qu’ils soient tous si occupés, là-bas, dans les bureaux de la Brigade parce que si tu avais été poursuivi dans ce couloir, on t’aurait sans nul tombé dessus et rapatrié pour faire des heures supplémentaires après cette collision idiote. Rien que cette idée te fiche la nausée, c’est dire à quel point parfois, ton travail à le don de te déplaire. Moins tu en fais, certains jours, et mieux tu te portes, autant dire que ce soir et l’un d’entre eux. Alors tu souffles, oui. Un soupire désagréable, offensé et offensant, tu as probablement une part de responsabilité aussi importante que la personne que tu viens de percuter mais il a toujours été plus facile pour toi de charger les épaules d’autrui. Alors évidemment, lorsque tu relèves vivement la tête, lorsque ta capuche fine glisse sur ton crâne pour s’échouer sur tes épaules, tu es à deux doigts de te mettre à grogner, chose que tu évites parce que, c’est bon pour les Gryffondors, tout ça, après tout, tu n’es pas un sauvage.

« Ne pouvez pas regarder où vous— … » Mais tu t’arrêtes. Net. Te voilà figé, debout au beau milieu de ce couloir bondé et si personne ne vient te percuter les épaules, c’est uniquement parce que Granger est au sol, pile devant toi, et que les sorciers de passage s’efforcent de l’éviter, elle. Il ne manquait plus que ça, n’est-ce pas ? Elle fait parti de ces gens que tu craignais de croiser un jour au Ministère. L’une des raisons qui t’ont fait grandement hésiter, quand au fait d’accepter ce travail. Oh, tu ne crains toujours pas Potter, Granger, et encore moins Weasley, cependant, le jugement fait mal Malefoy, et te retrouver trop proche de ces fameux héros – qui continuent de te donner envie de vomir – ne fait que te procurer un intense sentiment de frustration qui débouche régulièrement sur de la colère, voir de la haine inexpliquée. « Aurais-tu perdu l’usage de tes énormes yeux globuleux, Granger ? » Un peu comme ça, oui. Le pire Drago, est sans doute cette petite voix au fin fond de ton crâne qui te hurles à quel point tu es ridicule et comme on pourrait se croire de retour à Poudlard bien des années auparavant.

Réajustant ton col, tu détournes les yeux. Hors de question, bien évidemment, de lui tendre la main pour lui offrir ton aide afin de se redresser, si tu t’efforces de bien moins ressembler à ton père qu’auparavant, il ne faut pour autant pas trop t’en demander. A la place, lorsque tes yeux d’acier reviennent à elle, c’est pour la toiser de toute ta hauteur. Elle a changé. C’est une pensée étrange qui s’impose pourtant dans ton esprit … tu avais côtoyer cette pauvre fille durant des années, et à ton plus grand déplaisir, tu l’avais eu dans ton sillage et dans ton champ de vision à de trop nombreuses reprises. « Tu fais peine à voir. » Tu es presque satisfait de pouvoir lui lancer une telle chose. Comme si finalement, tu délectais du fait de ne pas être le seul à être un peu pitoyable. « Tu vas rester par terre encore longtemps ? Tu gênes. »

Détestable. Tu es détestable, Drago. Incapable de faire preuve d’un peu de bon sens, encore moins de politesse ou de galanterie, tu te contentes des moqueries, des remarques blessantes. Parce que oui, c’est ce que tu cherches à faire. Atteindre. Blesser. C’est toujours comme ça quand il s’agit de cette misérable sorcière de bas étage, tu ne peux même pas te résoudre à t’en détourner, tu as toujours l’impression de lui donner le dernier mot et de lui offrir une victoire, du coup, tu t’acharnes, et ce n’est jamais bénéfique, mais tu ne peux pas faire autrement.

« Oh, évidemment, comme c’est pratique. » Et ça commence. Ou plutôt, ça recommence. Cette joute perpétuelle, chacun essayant d’avoir le dessus, et d’avoir raison. Tu lèves même les yeux au ciel, comme à l’époque, pour bien lui faire comprendre à quel point elle t’exaspère avec ses raisonnements. « Quand on n’est pas capable de traîner convenablement sa pauvre carcasse, on évite de se montrer en public. » Tu joues de ce que tu vois, de ce qu’elle te met sous les yeux. Ses traits tirés. Ses joues creusées. Sa silhouette amaigrie. Pas un instant tu ne te dis qu’elle n’est pas bien, non, en revanche, tu ne manques pas de te faire la réflexion qu’elle fait largement pitié. « Et je ne dois pas le moindre gramme de respect, Granger. » Il ne manquerait plus que ça, n’est-ce pas Drago ? C’est qu’il ne faut pas trop exagérer, si ta surveillance à pris fin, et que tu n’es plus contraint de te rendre qu’à un contrôle tous les deux mois désormais, c’est parce que tu as montré des signes de progrès dans bien des domaines. Oui, Drago, tu as promis de garder ton racisme enfermé dans une boîte à double tour, de cesser d’être insultant. Il en va de ta vie, mais surtout, de ta liberté. Tu pourrais bien rejoindre ton père si tu en viens à dépasser les limites encore une fois et pourtant … pourtant, c’est plus fort que toi, tu ne peux pas te dire que tu dois quelque chose à cette agaçante Miss-Je-Sais-Tout. A cette …

Tu pourrais te mordre la langue. Autant pour éviter de sortir ces mots, que pour cesser d’y penser. Visiblement, tu as encore un sacré travail à faire sur toi-même. Mais c’est sa faute à elle ! C’est sa présence devant toi, ses provocations qui te font perdre les pédales. Et c’est pire quand elle évoque ton contrôle judiciaire, tes potentiels ennuis. « Ça ne te concerne pas. Mais pour ta gouverne, sache que je suis un sorcier libre travaillant pour ce Ministère désormais. Garde donc ton besoin de faire justice pour d’autres. » Et cette fois, c’en est trop. Tu sens que ton sang bouillonne dans tes veines, il faut que tu t’éloignes de cette fille avant de ressentir l’envie de l’étriper au beau milieu de ce couloir. Et c’est pour cette raison que tu te détournes pour mettre fin à cet échange, tu le fais pile au moment où elle semble décidée à en faire de même. Mais elle trébuche. Et tu sens une dernière remarque désobligeante monter. Interrompue par le sac qu’elle balance dans tes bras. « Pardon ?! » Et voilà. Tu perds ton sang-froid, cette fois. Et ton haussement de voix alerte quelques passants de plus, qui te lancent des regards méfiants que tu ne remarques même pas, tant tu es concentré sur elle, et sur ce sac que tu tournes dans tous les sens tant il est lourd, encombrant. « Je ne suis pas responsable de ta stupidité ! » Même si entre nous, l’un des soucis majeurs avec elle, c’est qu’elle n’a jamais été stupide, justement. « Granger ! Reviens ici ! » Et te voilà, lancé à sa poursuite. Lorsqu’elle entre dans les toilettes – ceux des dames – tu n’as même pas de scrupules à la suivre, tu offres même une sacrée grimace à une bureaucrate qui te regardes de travers alors que tu balances le sac de l’ex Gryffondor sur le carrelage. « Ne t’imagine pas que ta pseudo notoriété te donnes le droit et la possibilité de me traiter comme un vulgaire elfe de maison, tu es et tu resterais la même misérable Sang de Bourbe ! »

Et ça claque. Ces mots, ils franchissent la barrière de tes lèvres bien trop facilement à ton goût et très honnêtement, Drago, tu te maudis quasiment aussitôt, la preuve, une grimace vient s’imprimer sur ton visage, comme si le fait d’avoir prononcer cette insulte, pourtant si courante dans ta bouche quelques années auparavant, venait littéralement de t’arracher la gorge. Et encore une fois, c’est contre elle que tu pestes, et à la fois, tu t’en veux de faire ça, et bien trop rapidement, tu te retrouves pris dans un tourbillon de pensées contradictoires, sans toutefois parvenir à en sortir. Tu te sens comme à l’agonie. En train de te noyer. Et tu fais un pas en arrière, le souffle court, les yeux grands ouverts.

« Essaie pour voir. » Ça, c’est le comble. N’importe qui ce serait sans doute excuser, dans ton état. Ou du moins, aurait abandonner, ou fuis. Battre en retraite aurait été une solution plus adaptée, assurément. De même que changer de sujet, ou au moins te taire et la laisser faire. Oui, mais voilà, tu n’étais pas n’importe qui et malgré le gros travail que tu t’acharnais à faire sur toi-même, il était évident que c’était loin d’être parfait. On n’effaçait pas son éducation d’un trait, comme tu l’avais espéré. Ton père t’avais construit, tu ne pouvais décemment pas espérer échapper à son emprise d’un claquement de doigts et ce qui te dégoutte le plus, c’est de te dire que s’il était là, présentement, il serait très certainement très fier de toi.

Tu la fixes sans baisser les yeux. Par fierté, bien que celle-ci soit plutôt en berne actuellement. Il y a quand même une petite pointe de satisfaction, en toi, lorsqu’elle détourne les yeux ainsi que sa baguette, au moins, tu n’as pas paniqué comme tu aurais pu le faire durant votre scolarité, il y a du progrès, pas du côté que tu espérais, mais tout de même. Au moins, tu restes silencieux pendant ce temps-là, jusqu’à ce qu’elle récupère ses affaires dans l’optique de sortir. « Ouais, c’est ça. » Une nouvelle grimace est venue s’imprimer sur ta face. Si tu crois en ses pseudos bons sentiments à la noix ? Absolument pas. Tu la considères comme une moins que rien, elle en fait de même, ça ne devrait pas t’étonner mais encore une fois … certaines habitudes ont la dent dure.

Tu la laisses sortir, les lèvres pincées, ta baguette serrée dans ta manche, et ce n’est que lorsque la porte claque à nouveau pour laisser entrer une jeune femme qui te fixes avec insistance un moment que tu réagis. Rageusement, tu la bouscules pour sortir des toilettes et si tu l’entends protester, et même t’insulter, bizarrement face à cette idiote sans intérêt, tu ne réagis pas. Tu te presses simplement pour rattraper Granger, et une fois que c’est fait, tu oses l’attraper par le bras. « Mes mots ont dépassés ma pensée. Je ne m’excuserais pas pour autant. Bonne soirée, Granger. » Là-dessus, honteux, atteint dans ta fierté maladive, tu disparais dans la foule qui se presse vers la sortie.